CAA de NANTES, 4ème chambre, 13/04/2018, 16NT01665, Inédit au recueil Lebon

Date :
13-04-2018
Taille :
5 pages
Section :
Jurisprudence
Numéro :
16NT01665
Formation :
4ème chambre

Texte original :

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Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Atelier Belenfant Daubas Architectes (ABDA) a demandé au tribunal administratif de Nantes, d'une part, d'annuler le titre de recette exécutoire n° 208 émis le 5 septembre 2013 par le syndicat mixte Centre Nord Atlantique (SMCNA), pour un montant de 66 092, 46 euros, ou à titre subsidiaire, de réduire le quantum des sommes dont le paiement est demandé et, d'autre part, de condamner solidairement la société Ecodiag et la société Charier TP à la garantir de toutes condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre.
Par un jugement n° 1308540 du 16 mars 2016 le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de la société Atelier Belenfant Daubas Architectes
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés le 19 mai 2016 et le 1er mars 2018, la société Atelier Belenfant Daubas Architectes, représentée par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 16 mars 2016 ;
2°) d'annuler le titre exécutoire n° 208 émis le 5 septembre 2013 par le syndicat mixte Nord Atlantique, pour un montant de 66 092, 46 euros, à titre subsidiaire, de réduire le quantum des sommes dont le paiement est demandé ;
3°) de condamner solidairement la société Ecodiag et la société Charier TP à la garantir de toutes condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre ;
4°) de mettre à la charge solidaire de la société Ecodiag, de la société Charier TP et du SMCNA la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le titre exécutoire est illégal au fond ; deux types de travaux supplémentaires ont été nécessaires ; ceux concernant la couche de fondation de voirie légère, pour un montant de 29 440 euros HT, ce qui respecte l'enveloppe des travaux prévue à l' article 6.1 du CCAP, et ceux concernant la couche d'usure de la voirie lourde, pour un montant de 25 821 euros HT ; l'enveloppe et le seuil de tolérance ayant été respectés, aucune sanction n'avait à être prise ;
- à titre subsidiaire, les sommes demandées ne sont pas justifiées dans leur quantum ; le jugement attaqué reprend la somme de 5 239 001,63 euros TTC au titre du montant total des travaux et retient un dépassement d'un montant de 18 741,63 euros ; la condamnation ne saurait donc excéder cette somme ; subsidiairement, le montant total des travaux complémentaires s'élève à 45 330 euros HT ; si la somme retenue n'est pas celle de 18 741,63 euros, c'est la somme maximum de 45 330 euros HT qui devrait l'être ;
- à titre subsidiaire, elle est bien fondée à demander à être garantie par les sociétés Ecodiag, économiste en charge de l'établissement du CCTP et du DPGF, et Charier TP, titulaire du lot VRD ; cette demande de garantie présente un lien suffisant pour être rattachée au litige principal.
Par deux mémoires en défense, enregistrés le 29 novembre 2016 et le 3 janvier2017, le syndicat mixte Centre Nord Atlantique, représenté par MeF..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la société Atelier Belenfant Daubas Architectes la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que :
- la requête est irrecevable dès lors qu'elle ne comporte pas de demande d'infirmation du jugement attaqué, moyen par moyen et méconnaît l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
- c'est à bon droit que le tribunal administratif de Nantes a jugé que la créance était bien fondée dans son principe et dans son quantum.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 décembre 2016, la société Ecodiag - Groupe Nox, représentée par MeD..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la société Atelier Belenfant Daubas Architectes la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- ainsi que l'a jugé le tribunal administratif de Nantes, l'appel en garantie formé par le SMCNA est sans lien avec l'action principale tendant à obtenir l'annulation du titre exécutoire ;
- à titre subsidiaire, la demande principale tendant à l'annulation du titre exécutoire est mal fondée, en l'absence de créance certaine, liquide et exigible ;
- en tout état de cause, il n'y a pas de lien de causalité entre l'intervention de la société Ecodiag et le surcoût de travaux sur le lot VRD ayant donné lieu à la régularisation d'un avenant n°1 au marché de la société Charier TP.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 16 et le 23 décembre 2016, la société Charier TP, représentée par MeE..., conclut au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à ce que la société Charier TP la garantisse de toutes les condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre et à ce que soit mise à la charge solidaire de la société Atelier Belenfant Daubas Architectes et de la société Charier TP la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que le jugement attaqué doit être confirmé et que les moyens soulevés par la société Atelier Belenfant Daubas Architectes ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code civil ;
- le décret n°93-1268 du 29 novembre 1993 relatif aux missions de maîtrise d'oeuvre confiées par des maîtres d'ouvrage publics à des prestataires de droit privé ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Tiger-Winterhalter, présidente assesseure ;
- les conclusions, de M. Bréchot, rapporteur public ;
- et les observations de Me A...pour la société atelier Belenfant Daubas Architectes et celles de Me F...pour le syndicat mixte centre nord Atlantique.
Considérant ce qui suit :
1. Le syndicat mixte Centre Nord Atlantique (SMCNA) a engagé, au cours de l'année 2010, une opération de réaménagement du site de l'usine de traitement des déchets ménagers et de création d'un parcours pédagogique sur le site des Brieulles, à Treffieux (Loire-Atlantique). Il a confié la maîtrise d'oeuvre de cette opération à la société Atelier Belenfant Daubas Architectes (ABDA), l'économie du projet à la société Ecodiag et la réalisation du lot " voirie réseaux divers (VRD) " à la société Charier TP. Au moment de la réalisation des travaux, les quantités nécessaires se sont avérées insuffisantes pour réaliser la voirie dans les règles de l'art. Un avenant au marché de travaux " VRD " a donc été conclu le 6 septembre 2012 avec la société Charier TP pour un montant de 66 092,46 euros TTC. Estimant que ce surcoût était consécutif à une faute du maître d'oeuvre, qui avait omis de prévoir la fondation pour la voirie légère et la couche d'usure pour la voirie lourde et ainsi sous-estimé les quantités de matériaux et de travaux, le syndicat mixte Centre Nord Atlantique a imputé ces frais supplémentaires à la société ABDA et émis à l'encontre de cette dernière un titre exécutoire n° 208 le 5 septembre 2013, notifié le 17 septembre 2013, pour un montant de 66 092,46 euros correspondant au surcoût engagé du fait de ces travaux supplémentaires. La société ABDA relève appel du jugement du 16 mars 2016 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation ou à la réformation de ce titre de recette exécutoire.
Sur le bien-fondé du titre exécutoire :
2. Selon l'article 30-II du décret du 29 novembre 1993 relatif aux missions de maîtrise d'oeuvre confiées par des maîtres d'ouvrage publics à des prestataires de droit privé, lorsque la mission confiée au maître d'oeuvre comporte en outre la direction de l'exécution du contrat de travaux et l'assistance au maître de l'ouvrage lors des opérations de réception, le contrat prévoit également un engagement du maître d'oeuvre de respecter le coût, assorti d'un nouveau seuil de tolérance, qui résulte des contrats de travaux passés par le maître de l'ouvrage. Par ailleurs, l'article 6.1 du cahier des clauses administratives particulières du marché de maîtrise d'oeuvre conclu entre le syndicat mixte et la société ABDA stipule que l'enveloppe financière des travaux est de 435 000 euros HT, soit 520 260 euros TTC.
3. La société ABDA ne soutient même pas qu'elle n'aurait pas commis d'erreur dans l'évaluation des quantités de matériaux nécessaires à la réalisation de la voirie conformément aux règles de l'art et ne conteste pas sérieusement la nécessité de travaux supplémentaires afin de réaliser la couche de fondation de la voirie légère et la couche d'usure de la voirie lourde. Il ressort d'ailleurs du dossier que cette nécessité a été admise par l'expert de la société d'assurance MAF. Dans ces conditions, la circonstance que le syndicat mixte Centre Nord Atlantique a signé sans réserves l'avenant de la société Charier TP ajoutant une somme de 66 092,46 euros TTC au montant du marché initial, et modifiant par là même le marché de cette entreprise, ne saurait faire obstacle à ce que le maître d'ouvrage répercute ensuite sur le maître d'oeuvre le coût supplémentaire auquel elle a dû consentir du fait d'une sous-évaluation initiale, par celui-ci, de l'enveloppe nécessaire au financement des travaux. De même, la circonstance que l'enveloppe initialement prévue, ou marge de tolérance, ait été respectée ne fait pas obstacle à ce que le maître d'ouvrage puisse rechercher la responsabilité contractuelle du maître d'oeuvre pour les fautes commises par celui-ci qui ont rendu plus onéreuse l'opération de construction.
4. Par ailleurs, la société ABDA ne peut utilement se prévaloir de ce que l'entreprise Charier TP n'aurait pas respecté le cahier des clauses techniques particulières (CCTP) du marché de " voirie et réseaux divers " en conseillant un renforcement de la couche d'usure par huit centimètres de grave dès lors, comme il a été dit au point précédent, qu'il n'est pas sérieusement contesté que les travaux initialement prévus souffraient d'une sous-estimation de la quantité nécessaire pour réaliser la voirie dans les règles de l'art, du fait notamment de l'omission d'une couche d'usure pour la voirie lourde, et qu'ainsi il est établi qu'un renforcement de cette couche d'usure s'imposait.
5. Le montant de 66 092,46 euros TTC mis en recouvrement par le titre de recette contesté correspond au coût de réalisation d'une couche de fondation pour la voirie légère et d'une couche d'usure renforcée pour la voirie lourde, tel qu'il résulte du devis établi le 6 septembre 2012 par l'entreprise Charier TP. La société ABDA ne procède à aucune critique précise des éléments de ce devis. Dans ces conditions, elle n'établit pas le caractère excessif de la somme qu'il lui est demandé d'acquitter en se bornant à soutenir que le montant du titre de recette ne pourrait excéder la somme de 18 741,63 euros, correspondant au montant du dépassement de l'enveloppe totale des travaux prévu à l'article 6.1 du CCAP, ou la somme de 45 330 euros HT correspondant aux montants des travaux complémentaires de 29 440 euros pour la couche de fondation de la voirie légère et de 15 890 euros pour la couche d'usure de la voirie lourde.
Sur les conclusions d'appel en garantie :
6. Aucune faute ne saurait être reprochée à la société Charier TP, qui a respecté les stipulations du CCTP et s'est bornée à mettre en oeuvre les travaux supplémentaires qui se sont avérés nécessaires afin que les travaux de voirie soient réalisés conformément aux stipulations du marché et aux règles de l'art. Quant à la société Ecodiag, si elle a contribué à l'élaboration du CCTP, la requérante ne fournit aucune précision quant à l'étendue exacte de sa mission, notamment sur le rôle qui était le sien dans la définition des quantités de matériaux nécessaires pour satisfaire aux prescriptions du marché. Dans ces conditions, les conclusions d'appel en garantie formées par la société ABDA à l'encontre des sociétés Charier TP et Ecodiag doivent être rejetées.
7. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête, que la société Atelier Belenfant Daubas Architectes n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation ou la réformation du titre exécutoire émis à son encontre le 5 septembre 2013 par le syndicat mixte Centre Nord Atlantique et à ce que la société Ecodiag et la société Charier TP la garantissent des condamnations prononcées à son encontre.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge du syndicat mixte Centre Nord Atlantique la somme que demande la société Atelier Belanfant Daubas Achitectes au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société requérante d'une part une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par le syndicat mixte Centre Nord Atlantique et non compris dans les dépens et d'autre part la même somme au titre des frais de même nature exposés par la société Charier TP, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société Atelier Belenfant Daubas Architectes est rejetée.
Article 2 : La société Atelier Belenfant Daubas Architectes versera au syndicat mixte Centre Nord Atlantique et à la société Charier TP une somme de 1 500 euros chacune en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4: Le présent arrêt sera notifié à la société Atelier Belenfant Daubas Architectes, au syndicat mixte Centre Nord Atlantique, à la société Charier TP, à la société Ecodiag et à la direction régionale des finances publiques des Pays de la Loire.
Délibéré après l'audience du 27 mars 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- Mme Tiger-Winterhalter, présidente assesseure,
- Mme Rimeu, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 13 avril 2018.
La rapporteure,
N. TIGER- WINTERHALTERLe président,
L. LAINÉ
La greffière,
M. B...
La République mande et ordonne au préfet de la Loire-Atlantique en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°16NT01665