CAA de LYON, 6ème chambre - formation à 3, 15/02/2018, 15LY00602, Inédit au recueil Lebon
- Date :
- 15-02-2018
- Taille :
- 10 pages
- Section :
- Jurisprudence
- Numéro :
- 15LY00602
- Formation :
- 6ème chambre - formation à 3
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Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. et Mme E...ont demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner solidairement la commune de Valence et la société Dalkia puis, par un mémoire ultérieur, la commune de Valence et la société Omnium thermique des grands ensembles (Omnitherm) à leur verser la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts à raison des nuisances sonores émises par la chaufferie urbaine située à proximité de leur maison d'habitation et subsidiairement de surseoir à statuer dans l'attente des conclusions de l'expertise demandée en référé.
Par un jugement n° 1005849 du 18 décembre 2014, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté la requête de M. et Mme E...et a mis les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 19 618,59 euros, à la charge des consortsE....
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 17 février 2015 et un mémoire complémentaire enregistré le 1er juin 2016, M. et MmeE..., représentés par la SELARL CDMF-avocats, affaires publiques, demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1005849 du tribunal administratif de Grenoble en date du 18 décembre 2014 ;
2°) à titre principal, de condamner solidairement la société Omnitherm et la ville de Valence et, à titre subsidiaire, la ville de Valence, à leur verser la somme de 189 000 euros en réparation des préjudices subis du fait du fonctionnement non conforme de la centrale de chauffage urbain depuis 2005, assortie de la capitalisation des intérêts échus depuis plus d'un an ;
3°) à titre principal, de condamner solidairement la société Omnitherm et la ville de Valence et, à titre subsidiaire la ville de Valence, à la prise en charge des frais d'expertise liquidés et taxés à hauteur de 19 618,59 euros ;
4°) d'enjoindre à la société Omnitherm de réaliser, sous astreinte, les mesures prescrites par l'expert aux fins de faire cesser le dysfonctionnement de la centrale ;
5°) à titre principal, de mettre à la charge solidaire de la société Omnitherm et de la ville de Valence et, à titre subsidiaire, de la ville de Valence la somme de 8 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Ils soutiennent que :
- le jugement est irrégulier dès lors qu'en retenant le moyen tiré de l'antériorité de l'ouvrage par rapport à leur installation dans leur maison tout en relevant le caractère anormal des travaux publics du dommage et le caractère anormal et spécial de leur préjudice, le tribunal a entaché son jugement d'une contradiction de motifs et d'une erreur de droit ; que si le tribunal a retenu l'antériorité indépendamment des dispositions de l'article L. 112-16 du code de la construction et de l'habitation, il a statué ultra petita ;
- l'article L. 112-16 du code de la construction et de l'habitation ne peut être utilement invoqué dans le cadre d'un litige relatif à un dommage de travaux publics ; ces dispositions prévoient deux conditions cumulatives, peu importe l'absence d'aggravation du préjudice postérieurement à leur installation dans leur maison ;
- le tribunal ne pouvait retenir l'antériorité de l'installation dès lors que le droit à indemnisation résulte du caractère anormal des préjudices subis ; le non respect des dispositions réglementaires exclut tout bénéfice de l'antériorité ; les désordres en cause ne se sont révélés dans leur ampleur qu'au mois de novembre 2006, soit postérieurement à leur installation ;
- l'expert a mis en évidence le caractère non conforme de l'installation et le caractère anormal du fonctionnement de la centrale ;
- la société Omnitherm, délégataire de l'installation, est responsable des dommages à raison du fonctionnement de l'ouvrage délégué ; il y a lieu de condamner solidairement la ville de Valence et la société Omnitherm pour les couvrir d'une éventuelle insolvabilité du délégataire et compte tenu de ce qu'ils ne sont pas en mesure de s'assurer de l'absence de clauses contractuelles exonérant le délégataire au profit de l'autorité délégante ;
- à titre subsidiaire, le maire reste compétent sur le fondement de son pouvoir de police générale pour intervenir en cas de péril imminent ; le maire est tenu d'actionner les services compétents lorsqu'il est alerté de nuisances en matière d'installations classées ; la carence du maire constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la commune ;
- les nuisances résultant du fonctionnement de la centrale dans des conditions non conformes aux prescriptions la régissant seront indemnisées à hauteur de 135 000 euros ; la perte de la valeur vénale de la maison sera estimée à 54 000 euros ;
- l'expert a souligné que l'installation de cogénération sera toujours non conforme malgré l'arrêt d'une des deux turbines ; l'étude acoustique réalisée par AD Ingienerie se limite à la cogénération et ne permet pas de s'assurer de la conformité du fonctionnement simultané de toutes les installations du site ;
- la société Omnitherm ne justifie pas de la mise en conformité de la centrale de Valence ;
- au jour de l'acquisition de leur habitation, ils ne pouvaient présumer du caractère manifestement défectueux et non conforme de l'installation voisine et ce particulièrement en période nocturne ;
- l'expertise est argumentée ; si des mesures ont été réalisées de façon inopinée, elles n'ont eu pour but que de confirmer les résultats des mesures réalisées contradictoirement ; le président du tribunal administratif a estimé que les parties ne sauraient utilement s'opposer à la réalisation de mesures inopinées ;
- les troubles n'ont pas cessé depuis les nouveaux travaux ; les préjudices subis ne sont pas directement liés à la proximité immédiate de la centrale mais à son mode de fonctionnement non conforme ;
Par un mémoire en défense enregistré le 23 juin 2015, et un mémoire complémentaire, enregistré le 30 octobre 2017, la société Omnium thermique des grands ensembles (Omnitherm), représentée par Me Mondan, conclut au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, à ce que la ville de Valence la garantisse des condamnations prononcées à son encontre.
Elle soutient que :
- les époux E...ne sont plus fondés à demander la réparation du préjudice lié à la perte de la valeur vénale de leur propriété et ne peuvent réclamer une indemnisation au titre du préjudice de jouissance qu'à compter de 2013 dès lors que l'une des deux turbines à gaz qui constituaient l'installation de cogénération de 2000 à 2012 a été arrêtée définitivement le 1er janvier 2013 ; la seconde turbine a redémarré en novembre 2013 après sa rénovation complète au cours de l'intersaison 2013 ; ces travaux ont permis d'améliorer significativement les performances acoustiques de l'installation de cogénération ;
- l'avenant n° 10 signé le 10 juillet 1986 à la convention d'affermage prévoit que la ville de Valence conserve la propriété et la maîtrise d'ouvrage de la chaufferie conventionnelle ainsi que la responsabilité de sa conformité réglementaire et répond seule des conséquences relatives aux troubles anormaux de voisinage causées par la chaufferie ; la ville de Valence devrait également assumer les travaux préconisés par l'expert ;
- l'article L. 112-16 du code de la construction et de l'habitation est inapplicable aux dommages de travaux publics ;
- les époux E...ne démontrent pas que les inconvénients liés au fonctionnement de l'ouvrage n'étaient pas prévisibles lors de leur acquisition ou se sont aggravés postérieurement à celle-ci ;
- elle s'oppose au protocole de mesurage proposé par l'expert ;
- la cogénération est actuellement conforme aux normes de bruits fixées par l'arrêté du 23 janvier 1997 et ce depuis 2013 ;
- il n'a jamais été évalué un préjudice résultant de l'anormalité du dommage liée au seul dépassement des seuils réglementaires ; les époux E...ne démontrent pas le lien de causalité entre les prétendues non-conformités de la centrale et les troubles dans les conditions d'existence ;
- le préjudice lié à la perte de la valeur vénale de leur maison ne sera pas indemnisé dès lors que les époux E...ont acquis leur pavillon en 2005 et que le prix d'achat de leur propriété prenait déjà en considération la présence de la centrale ;
- elle ne peut plus être concernée par une demande de condamnation sous astreinte postérieurement au 1er janvier 2017 dès lors qu'elle n'est plus délégataire à compter de cette date ;
Par un mémoire en défense enregistré le 20 janvier 2017, la ville de Valence, représentée par Me C...B..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge des époux E...la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- il n'existe aucune contradiction des motifs entachant le jugement dès lors que l'antériorité de l'installation est reconnue par les juridictions administratives indépendamment des moyens soulevés par les parties et du régime propre de l'article L. 112-16 du code de la construction et de l'habitation ; le jugement ne vise pas l'article L. 112-16 du code de la construction et de l'habitation ;
- le principe de l'antériorité peut être appliqué dès lors que les époux E...avaient connaissance de la réalité et de l'étendue des préjudices à la date à laquelle ils ont acheté leur maison d'habitation ; il n'est pas établi que les conditions de fonctionnement de la centrale de chauffage urbain aient évolué notablement depuis sa mise en service ;
- seule la responsabilité de la société délégataire peut être recherchée compte tenu de ce qu'il n'est pas établi que la société délégataire serait insolvable ;
- le délégataire ne peut faire valoir que les stipulations contractuelles permettent de mettre à la charge de la commune des responsabilités plus étendues dès lors que le contrat n'a pas vocation à être opposable aux tiers ;
- seul l'Etat peut voir sa responsabilité engagée au titre de la police des installations classées ; aucune situation de péril imminent ne justifie que le maire fasse usage de ses pouvoirs de police générale ;
Par lettre du 12 décembre 2017, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que les conclusions d'injonction dirigées contre la société Omnitherm sont irrecevables dès lors qu'il n'appartient pas au juge administratif d'adresser des injonctions à des personnes privées.
Par ordonnance du 5 octobre 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 3 novembre 2017.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- l'arrêté d'autorisation de modification de la chaufferie urbaine de Valence le Haut du préfet de la Drôme 27 avril 2000 ;
- l'arrêté ministériel du 23 janvier 1997 relatif à la limitation des bruits émis dans l'environnement par les installations classées pour la protection de l'environnement ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Caraës,
- les conclusions de Mme Marie Vigier-Carrière, rapporteur public,
- et les observations de Me Harel, avocat de M. et MmeE..., de Me D...substituant Me Petit, avocat de la commune de Valence et de Me Mondan, avocat de la société Omnitherm.
Une note en délibéré présentée par M. et Mme E...a été enregistrée le 22 décembre 2017.
Une note en délibéré présentée par la société Omnitherm a été enregistrée le 4 et le 5 janvier 2017.
1. Considérant que M. et Mme E...ont acquis en septembre 2005 un immeuble à usage d'habitation situé 16 allée Edouard Manet à Valence, à 30 mètres de la chaufferie urbaine dite de Valence-le-Haut construite à la fin des années 1960, installation soumise à la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement ; que cette chaufferie urbaine comprenait initialement une chaufferie conventionnelle au gaz comportant trois chaudières ; qu'à cette chaufferie conventionnelle a été ajoutée, à compter du 1er décembre 2000, une centrale de cogénération comportant deux unités de cogénération installées dans un bâtiment dédié et fonctionnant chacune grâce une turbine à gaz ; que la commune de Valence a délégué par convention d'affermage la gestion du service de distribution publique d'énergie calorifique à la société Omnium thermique des grands ensembles (Omnitherm) ; que les époux E...subissant une gêne quotidienne dans leurs conditions d'existence à raison du fonctionnement de cette centrale de chauffage ont saisi le tribunal administratif de Grenoble d'une demande tendant à la condamnation solidaire de la commune de Valence et de la société Omnitherm en réparation des nuisances sonores subies et d'une demande tendant à la désignation d'un expert ; que, par ordonnance du 1er avril 2011, le tribunal administratif de Grenoble a désigné M.A..., ingénieur acousticien, en qualité d'expert ; que celui-ci a déposé son rapport le 7 mai 2013 ; que M. et Mme E...relèvent appel du jugement du 14 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant, d'une part, que M. et Mme E...soutiennent que le jugement est entaché d'une contradiction de motifs dès lors qu'après avoir constaté que les nuisances sonores et vibratoires qu'ils subissent présentaient un caractère anormal et spécial, les premiers juges ont retenu que les requérants ne pouvaient ignorer qu'ils pouvaient subir des nuisances sonores en décidant d'acquérir une maison d'habitation située à proximité immédiate d'une installation de production de chaleur comportant des chaudières et des turbines et qu'ils n'établissaient pas une modification dans les conditions de fonctionnement de la chaufferie et de la centrale postérieure à l'installation des intéressés ; que, toutefois, une éventuelle contradiction entre les motifs d'un jugement n'est susceptible d'affecter que le bien-fondé de la décision juridictionnelle et non sa régularité ;
3. Considérant, d'autre part, qu'il ressort du dossier de première instance transmis par le tribunal à la cour que, par un mémoire enregistré le 23 juin 2015, la société Omnitherm invoquait, indépendamment de la méconnaissance de l'article L. 112-16 du code de la construction et de l'habitation, la règle jurisprudentielle de l'antériorité de l'ouvrage public par rapport à l'acquisition du bien ; que, par suite, les premiers juges n'ont pas soulevé d'office le moyen tiré de l'antériorité de l'ouvrage public et n'ont pas entaché d'irrégularité leur jugement ;
Sur la responsabilité :
4. Considérant, d'une part, que la mise en jeu de la responsabilité sans faute d'une collectivité publique pour dommages de travaux publics à l'égard d'un justiciable qui est tiers par rapport à un ouvrage public ou un opération de travaux publics est subordonnée à la démonstration par cet administré de l'existence d'un dommage grave et spécial et d'un lien de causalité entre cet ouvrage ou cette opération et les dommages subis ; que les personnes mises en cause doivent pour dégager leur responsabilité, établir que le dommage est imputable à la faute de la victime ou à un cas de force majeure, sans que puisse utilement être invoqué le fait du tiers ;
5. Considérant, d'autre part, que si le propriétaire d'une maison d'habitation ne peut ignorer, à la date de l'acquisition de l'immeuble, les inconvénients résultant de la proximité d'un ouvrage public préexistant et ne peut dès lors prétendre obtenir une indemnisation des préjudices subis à ce titre, il en va toutefois différemment d'un dommage résultant pour lui du non respect des prescriptions légales ou réglementaires régissant le fonctionnement de l'ouvrage public, dans le cas où il ne pouvait en avoir connaissance lors de l'acquisition de son habitation ou qu'il ne pouvait raisonnablement le prévoir, et dès lors que ce dommage présente un caractère grave et spécial ;
En ce qui concerne la cause des dommages :
6. Considérant que les époux E...font valoir que le fonctionnement de la centrale de Valence-le-Haut est à l'origine depuis 2006 d'importantes nuisances sonores et vibratoires ; qu'ils indiquent subir en permanence, à raison du fonctionnement défectueux de la centrale de chauffage, des bruits impulsionnels, et un bruit continu pendant cinq mois, du 1er novembre au 31 mars, ainsi que des vibrations de tout le premier étage de leur maison qui les contraignent à n'habiter qu'au rez-de-chaussée ;
7. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment des relevés sonores effectués du 19 au 21 janvier 2008 et le 13 avril 2008 par le cabinet Beaudet et du rapport d'expertise non sérieusement contesté quant à la période représentative des mesures acoustiques que, s'agissant de la centrale de cogénération, son fonctionnement ne respecte pas la réglementation relative aux niveaux sonores en période nocturne ; que ses émergences sont comprises entre 6 et 10 db(A) alors que le niveau de l'émergence admissible pour la période allant de 22 h à 7 h ainsi que les dimanches et jours fériés est de 3db (A) ; qu'en outre, les fréquences basses, à 80 et 100 Hz, engendrent une gêne importante et ont pour effet de mettre en vibration la toiture, les cloisons et les fenêtres du premier étage de la maison des épouxE... ; que, s'agissant de la chaufferie conventionnelle au gaz, le démarrage de chacune des trois chaudières engendre un bruit supérieur à la valeur fixée par la réglementation et dépasse les 3 dB(A) d'émergence autorisés ; que les mesures réalisées mettent en évidence la non-conformité nocturne de chaque composant de la chaufferie ; que ce fonctionnement défectueux a été confirmé par l'expertise confiée à M. A... qui précise que " les mesurages mettent en évidence la non-conformité nocturne de chacun des composants de la chaufferie " ;
8. Considérant que la société Omnitherm fait valoir que la qualification d'anormalité des préjudices subis du fait du fonctionnement de la centrale ne peut être retenue dès lors qu'à la date d'acquisition de leur maison d'habitation, les époux E...ne pouvaient ignorer les inconvénients résultant de l'existence et du fonctionnement de cette centrale ; que, cependant, les époux E...se prévalent de ce que les nuisances sonores excédent les sujétions que les riverains d'un ouvrage public doivent normalement supporter, compte tenu du non respect de l'arrêté préfectoral du 27 avril 2000 par lequel le préfet de la Drôme a autorisé l'exploitation de la centrale de chauffage sous réserve du respect, notamment, de valeurs limites d'émissions sonores tels que fixées par l'arrêté ministériel du 23 janvier 1997 relatif à la limitation des bruits émis dans l'environnement par les installations classées pour la protection de l'environnement, ce dont ils n'avaient pas connaissance et qu'ils ne pouvaient prévoir lors de l'acquisition de leur habitation ;
9. Considérant que les époux E...ont acquis leur habitation par un compromis en date du 22 juin 2005, l'acte notarié ayant été signé le 27 septembre suivant ; qu'ils soutiennent sans être sérieusement contredits que ce n'est qu'après leur emménagement et lors de la saison de chauffe qu'ils ont pu se rendre compte des nuisances excessives qu'ils subissent notamment en période nocturne ; qu'il résulte de l'instruction que les résultats des mesures annuelles du niveau de bruit et de l'émergence effectués par l'exploitant de l'installation classée et transmis à l'administration ne faisaient pas apparaître de dépassement des normes de bruit ; que, toutefois, selon l'expert, ces mesures, telles qu'elles ont été réalisées par les techniciens, n'auraient pas été entièrement fiables ; que si, pour les années 2006 et 2007, les requérants n'apportent pas d'élément démontrant que la centrale de chauffage ne respectait pas les prescriptions réglementaires afférentes aux valeurs limites d'émissions sonores, ils produisent des relevés sonores effectués du 19 au 21 janvier 2008 et le 14 avril 2008 par le cabinet Beaudet, dans le cadre de leur protection juridique, qui, ainsi qu'il a été dit au point précédent, établissent la non conformité du fonctionnement de la centrale de chauffage à l'arrêté du 27 avril 2000 du préfet de la Drôme prescrivant, par référence à l'arrêté ministériel du 23 janvier 1997, des valeurs limites d'émissions sonores, ce qu'a confirmé le rapport d'expertise ; que, par suite, et pour la période postérieure à 2007, la société Omnitherm ne peut se prévaloir de l'antériorité du fonctionnement de son installation, compte tenu de ce que la non-conformité des conditions de fonctionnement de l'installation aux prescriptions fixées par l'arrêté préfectoral du 27 avril 2000 ne pouvait être connue des intéressés lors de l'acquisition de leur habitation et qu'il ne résulte pas de l'instruction que le niveau sonore des installations était tel, lorsqu'ils se sont portés acquéreurs de leur maison, à une période située en dehors de la saison de chauffe, qu'ils auraient été en mesure de tenir pour vraisemblable qu'il ne respectait pas les normes applicables ;
10. Considérant que la société Omnitherm indique avoir procédé à l'arrêt définitif d'une des deux turbines à gaz de la cogénération à compter du 1er janvier 2013 et à des travaux permettant de mettre en conformité l'installation avec les prescriptions fixées par l'arrêté préfectoral du 27 avril 2000 ; qu'elle a fait réaliser une nouvelle étude de conformité acoustique de l'installation après la rénovation de la centrale de cogénération et avec une chaudière en fonctionnement minimal étant indiqué que " cependant un compresseur et deux pompes de la chaufferie ne pouvaient être arrêtés et la chaudière n°1 était en fonctionnement entre 54 et 56 % de sa puissance maximale " ; que M. et Mme E...n'établissent pas, par les relevés résultant de leurs propres observations, que les conclusions de cette étude qui précisent que les émergences nocturnes de la centrale de chauffage mesurées le 14 novembre 2014 sont inférieures aux émergences réglementaires nocturnes, seraient erronées ;
11. Considérant que la circonstance que la propriété des époux E...se situe dans une zone urbanisée ne fait pas obstacle en elle-même à la reconnaissance de la spécialité des préjudices subis ; qu'en l'espèce, eu égard à ce que la propriété des époux E...n'est située qu'à 30 mètres de la centrale de chauffage et au faible nombre de maisons dans une configuration identique, le préjudice résultant des nuisances sonores doit être regardé comme spécial ;
12. Considérant, qu'il résulte de l'instruction que, dans les circonstances rappelées ci-dessus, les nuisances sonores subies de 2008 à 2012 et résultant du non respect de la réglementation applicable à l'installation présentent par leur nature, leur intensité et leur répétition un caractère grave et spécial excédant les sujétions que les riverains de l'ouvrage public constitué par une centrale de chauffage doivent normalement supporter ;
En ce qui concerne la détermination de la personne responsable :
13. Considérant, d'une part, qu'en cas de délégation limitée à la seule exploitation de l'ouvrage, comme c'est le cas en matière d'affermage, si la responsabilité des dommages imputables à son fonctionnement relève du délégataire, sauf stipulations contractuelles contraires, celle résultant de dommages imputables à son existence, à sa nature et à son dimensionnement, appartient à la personne publique délégante ; que ce n'est qu'en cas de concession d'un ouvrage public, c'est-à-dire d'une délégation de son construction et de son fonctionnement, que peut être recherchée par des tiers la seule responsabilité du concessionnaire, sauf insolvabilité de ce dernier, en cas de dommages imputables à l'existence ou au fonctionnement de cet ouvrage ;
14. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la ville de Valence a confié, par contrat d'affermage, la gestion de son service de distribution publique d'énergie calorifique à la société Interchauffage aux droits de laquelle la société Omnitherm s'est substituée le 9 juillet 1968 et jusqu'au 1er janvier 2017 ; qu'en 1999, la société Omnitherm a construit, sous maîtrise d'ouvrage privée, la centrale de cogénération qui a donné lieu à un avenant n° 16 au contrat de délégation du service public de chauffage urbain ; qu'ainsi que l'ont relevé à bon droit les premiers juges, la société Omnitherm ne peut utilement invoquer les articles 4, 20 et 24 de l'avenant n° 10 au cahier des charges qui ont trait à la responsabilité de la commune de Valence résultant de l'existence des ouvrages dont elle est propriétaire et mettant à sa charge les modifications éventuelles de ces ouvrages en cas de modification de la réglementation dès lors que les nuisances sonores et vibratoires, qui ne sont pas imputables à l'existence, à la nature ou au dimensionnement de la centrale de chauffage, trouvent leur origine dans le fonctionnement de l'ouvrage public ; que, par suite, seule la responsabilité de la société Omnitherm peut être engagée ; que les époux E...ne sont dès lors pas fondés à demander la condamnation solidaire de la commune de Valence, personne publique délégante, dont la responsabilité n'est pas susceptible d'être engagée hormis, ce qui n'est pas établi, le cas de l'insolvabilité de la société Omnitherm ; qu'en conséquence, les épouxE..., tiers par rapport à l'ouvrage public, ne peuvent rechercher que la seule responsabilité sans faute du délégataire, la société Omnitherm ;
Sur les préjudices :
15. Considérant que les nuisances sonores et vibratoires causées par le fonctionnement de la centrale de chauffage ont été, entre 2008 et 2012, à l'origine de troubles dans les conditions d'existence des épouxE... ; qu'il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en l'évaluant à la somme de 10 000 euros ;
16. Considérant que les requérants soutiennent également qu'en raison de ces nuisances, leur maison d'habitation a perdu de sa valeur ; qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la société Omnitherm a procédé à l'arrêt définitif d'une des deux turbines à gaz de la cogénération à compter du 1er janvier 2013 et à des travaux permettant de mettre en conformité l'installation avec l'arrêté préfectoral du 27 avril 2000 susmentionné ; que cette mise en conformité est établie par une étude acoustique réalisée en novembre 2014 ; que, par suite, les requérants ne peuvent se prévaloir de la perte de la valeur vénale de leur maison d'habitation ;
17. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les requérants sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes ;
Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :
18. Considérant que les époux E...ont droit aux intérêts des sommes qui leur sont dues à compter du 24 décembre 2010, date d'enregistrement de leur demande indemnitaire au greffe du tribunal administratif de Grenoble ; que, le 17 septembre 2014, date d'enregistrement de la première demande de capitalisation des intérêts présentée devant le tribunal administratif de Grenoble, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément à l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande, ainsi qu'à chaque échéance annuelle ultérieure ;
Sur l'appel en garantie formé par la société Omnitherm à l'encontre de la ville de Valence :
19. Considérant que la société Omnitherm se borne à former un appel en garantie contre la ville de Valence sans déterminer les fondements de sa demande ni caractériser une quelconque faute ; que, par suite, son appel en garantie ne peut être accueilli ;
Sur les frais d'expertise :
20. Considérant qu'aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat./. Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties./. L'Etat peut être condamné aux dépens. " ;
21. Considérant qu'il y a lieu de mettre les frais et honoraires de l'expertise, taxés et liquidés à la somme de 19 618,59 euros, à la charge de la société Omnitherm ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
22. Considérant que M. et Mme E...demandent qu'il soit enjoint à la société Omnitherm de réaliser, sous astreinte, les mesures prescrites par l'expert aux fins de faire cesser le dysfonctionnement de la centrale ;
23. Considérant qu'il n'appartient pas au juge administratif d'adresser des injonctions à des personnes privées ; que, par suite, ces conclusions ne sont pas recevables ;
Sur les conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
24. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la ville de Valence, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, une somme quelconque au titre des frais exposés par les époux E...et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu de mettre à la charge de la société Omnitherm une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. et MmeE... ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des époux E...une somme au titre des frais exposés par la ville de Valence ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 18 octobre 2014 est annulé.
Article 2 : La société Omnitherm est condamnée à verser à M. et Mme E...une indemnité de 10 000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 24 décembre 2010. Les intérêts échus à la date du 14 septembre 2014 seront capitalisés à cette date et à chaque échéance annuelle ultérieure pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 3 : Les frais d'expertise sont mis à la charge définitive de la société Omnitherm.
Article 4 : La société Omnitherm versera à M. et Mme E...la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête, les conclusions de la société Omnitherm à fin d'appel en garantie, et les conclusions de la ville de Valence tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. et MmeE..., à la société Omnitherm et à la ville de Valence.
Délibéré après l'audience du 21 décembre 2017, à laquelle siégeaient :
M. Pommier, président de chambre,
M. Carrier, président-assesseur,
Mme Caraës, premier conseiller.
Lu en audience publique le 15 février 2018.
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N° 15LY00602
Procédure contentieuse antérieure
M. et Mme E...ont demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner solidairement la commune de Valence et la société Dalkia puis, par un mémoire ultérieur, la commune de Valence et la société Omnium thermique des grands ensembles (Omnitherm) à leur verser la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts à raison des nuisances sonores émises par la chaufferie urbaine située à proximité de leur maison d'habitation et subsidiairement de surseoir à statuer dans l'attente des conclusions de l'expertise demandée en référé.
Par un jugement n° 1005849 du 18 décembre 2014, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté la requête de M. et Mme E...et a mis les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 19 618,59 euros, à la charge des consortsE....
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 17 février 2015 et un mémoire complémentaire enregistré le 1er juin 2016, M. et MmeE..., représentés par la SELARL CDMF-avocats, affaires publiques, demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1005849 du tribunal administratif de Grenoble en date du 18 décembre 2014 ;
2°) à titre principal, de condamner solidairement la société Omnitherm et la ville de Valence et, à titre subsidiaire, la ville de Valence, à leur verser la somme de 189 000 euros en réparation des préjudices subis du fait du fonctionnement non conforme de la centrale de chauffage urbain depuis 2005, assortie de la capitalisation des intérêts échus depuis plus d'un an ;
3°) à titre principal, de condamner solidairement la société Omnitherm et la ville de Valence et, à titre subsidiaire la ville de Valence, à la prise en charge des frais d'expertise liquidés et taxés à hauteur de 19 618,59 euros ;
4°) d'enjoindre à la société Omnitherm de réaliser, sous astreinte, les mesures prescrites par l'expert aux fins de faire cesser le dysfonctionnement de la centrale ;
5°) à titre principal, de mettre à la charge solidaire de la société Omnitherm et de la ville de Valence et, à titre subsidiaire, de la ville de Valence la somme de 8 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Ils soutiennent que :
- le jugement est irrégulier dès lors qu'en retenant le moyen tiré de l'antériorité de l'ouvrage par rapport à leur installation dans leur maison tout en relevant le caractère anormal des travaux publics du dommage et le caractère anormal et spécial de leur préjudice, le tribunal a entaché son jugement d'une contradiction de motifs et d'une erreur de droit ; que si le tribunal a retenu l'antériorité indépendamment des dispositions de l'article L. 112-16 du code de la construction et de l'habitation, il a statué ultra petita ;
- l'article L. 112-16 du code de la construction et de l'habitation ne peut être utilement invoqué dans le cadre d'un litige relatif à un dommage de travaux publics ; ces dispositions prévoient deux conditions cumulatives, peu importe l'absence d'aggravation du préjudice postérieurement à leur installation dans leur maison ;
- le tribunal ne pouvait retenir l'antériorité de l'installation dès lors que le droit à indemnisation résulte du caractère anormal des préjudices subis ; le non respect des dispositions réglementaires exclut tout bénéfice de l'antériorité ; les désordres en cause ne se sont révélés dans leur ampleur qu'au mois de novembre 2006, soit postérieurement à leur installation ;
- l'expert a mis en évidence le caractère non conforme de l'installation et le caractère anormal du fonctionnement de la centrale ;
- la société Omnitherm, délégataire de l'installation, est responsable des dommages à raison du fonctionnement de l'ouvrage délégué ; il y a lieu de condamner solidairement la ville de Valence et la société Omnitherm pour les couvrir d'une éventuelle insolvabilité du délégataire et compte tenu de ce qu'ils ne sont pas en mesure de s'assurer de l'absence de clauses contractuelles exonérant le délégataire au profit de l'autorité délégante ;
- à titre subsidiaire, le maire reste compétent sur le fondement de son pouvoir de police générale pour intervenir en cas de péril imminent ; le maire est tenu d'actionner les services compétents lorsqu'il est alerté de nuisances en matière d'installations classées ; la carence du maire constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la commune ;
- les nuisances résultant du fonctionnement de la centrale dans des conditions non conformes aux prescriptions la régissant seront indemnisées à hauteur de 135 000 euros ; la perte de la valeur vénale de la maison sera estimée à 54 000 euros ;
- l'expert a souligné que l'installation de cogénération sera toujours non conforme malgré l'arrêt d'une des deux turbines ; l'étude acoustique réalisée par AD Ingienerie se limite à la cogénération et ne permet pas de s'assurer de la conformité du fonctionnement simultané de toutes les installations du site ;
- la société Omnitherm ne justifie pas de la mise en conformité de la centrale de Valence ;
- au jour de l'acquisition de leur habitation, ils ne pouvaient présumer du caractère manifestement défectueux et non conforme de l'installation voisine et ce particulièrement en période nocturne ;
- l'expertise est argumentée ; si des mesures ont été réalisées de façon inopinée, elles n'ont eu pour but que de confirmer les résultats des mesures réalisées contradictoirement ; le président du tribunal administratif a estimé que les parties ne sauraient utilement s'opposer à la réalisation de mesures inopinées ;
- les troubles n'ont pas cessé depuis les nouveaux travaux ; les préjudices subis ne sont pas directement liés à la proximité immédiate de la centrale mais à son mode de fonctionnement non conforme ;
Par un mémoire en défense enregistré le 23 juin 2015, et un mémoire complémentaire, enregistré le 30 octobre 2017, la société Omnium thermique des grands ensembles (Omnitherm), représentée par Me Mondan, conclut au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, à ce que la ville de Valence la garantisse des condamnations prononcées à son encontre.
Elle soutient que :
- les époux E...ne sont plus fondés à demander la réparation du préjudice lié à la perte de la valeur vénale de leur propriété et ne peuvent réclamer une indemnisation au titre du préjudice de jouissance qu'à compter de 2013 dès lors que l'une des deux turbines à gaz qui constituaient l'installation de cogénération de 2000 à 2012 a été arrêtée définitivement le 1er janvier 2013 ; la seconde turbine a redémarré en novembre 2013 après sa rénovation complète au cours de l'intersaison 2013 ; ces travaux ont permis d'améliorer significativement les performances acoustiques de l'installation de cogénération ;
- l'avenant n° 10 signé le 10 juillet 1986 à la convention d'affermage prévoit que la ville de Valence conserve la propriété et la maîtrise d'ouvrage de la chaufferie conventionnelle ainsi que la responsabilité de sa conformité réglementaire et répond seule des conséquences relatives aux troubles anormaux de voisinage causées par la chaufferie ; la ville de Valence devrait également assumer les travaux préconisés par l'expert ;
- l'article L. 112-16 du code de la construction et de l'habitation est inapplicable aux dommages de travaux publics ;
- les époux E...ne démontrent pas que les inconvénients liés au fonctionnement de l'ouvrage n'étaient pas prévisibles lors de leur acquisition ou se sont aggravés postérieurement à celle-ci ;
- elle s'oppose au protocole de mesurage proposé par l'expert ;
- la cogénération est actuellement conforme aux normes de bruits fixées par l'arrêté du 23 janvier 1997 et ce depuis 2013 ;
- il n'a jamais été évalué un préjudice résultant de l'anormalité du dommage liée au seul dépassement des seuils réglementaires ; les époux E...ne démontrent pas le lien de causalité entre les prétendues non-conformités de la centrale et les troubles dans les conditions d'existence ;
- le préjudice lié à la perte de la valeur vénale de leur maison ne sera pas indemnisé dès lors que les époux E...ont acquis leur pavillon en 2005 et que le prix d'achat de leur propriété prenait déjà en considération la présence de la centrale ;
- elle ne peut plus être concernée par une demande de condamnation sous astreinte postérieurement au 1er janvier 2017 dès lors qu'elle n'est plus délégataire à compter de cette date ;
Par un mémoire en défense enregistré le 20 janvier 2017, la ville de Valence, représentée par Me C...B..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge des époux E...la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- il n'existe aucune contradiction des motifs entachant le jugement dès lors que l'antériorité de l'installation est reconnue par les juridictions administratives indépendamment des moyens soulevés par les parties et du régime propre de l'article L. 112-16 du code de la construction et de l'habitation ; le jugement ne vise pas l'article L. 112-16 du code de la construction et de l'habitation ;
- le principe de l'antériorité peut être appliqué dès lors que les époux E...avaient connaissance de la réalité et de l'étendue des préjudices à la date à laquelle ils ont acheté leur maison d'habitation ; il n'est pas établi que les conditions de fonctionnement de la centrale de chauffage urbain aient évolué notablement depuis sa mise en service ;
- seule la responsabilité de la société délégataire peut être recherchée compte tenu de ce qu'il n'est pas établi que la société délégataire serait insolvable ;
- le délégataire ne peut faire valoir que les stipulations contractuelles permettent de mettre à la charge de la commune des responsabilités plus étendues dès lors que le contrat n'a pas vocation à être opposable aux tiers ;
- seul l'Etat peut voir sa responsabilité engagée au titre de la police des installations classées ; aucune situation de péril imminent ne justifie que le maire fasse usage de ses pouvoirs de police générale ;
Par lettre du 12 décembre 2017, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que les conclusions d'injonction dirigées contre la société Omnitherm sont irrecevables dès lors qu'il n'appartient pas au juge administratif d'adresser des injonctions à des personnes privées.
Par ordonnance du 5 octobre 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 3 novembre 2017.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- l'arrêté d'autorisation de modification de la chaufferie urbaine de Valence le Haut du préfet de la Drôme 27 avril 2000 ;
- l'arrêté ministériel du 23 janvier 1997 relatif à la limitation des bruits émis dans l'environnement par les installations classées pour la protection de l'environnement ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Caraës,
- les conclusions de Mme Marie Vigier-Carrière, rapporteur public,
- et les observations de Me Harel, avocat de M. et MmeE..., de Me D...substituant Me Petit, avocat de la commune de Valence et de Me Mondan, avocat de la société Omnitherm.
Une note en délibéré présentée par M. et Mme E...a été enregistrée le 22 décembre 2017.
Une note en délibéré présentée par la société Omnitherm a été enregistrée le 4 et le 5 janvier 2017.
1. Considérant que M. et Mme E...ont acquis en septembre 2005 un immeuble à usage d'habitation situé 16 allée Edouard Manet à Valence, à 30 mètres de la chaufferie urbaine dite de Valence-le-Haut construite à la fin des années 1960, installation soumise à la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement ; que cette chaufferie urbaine comprenait initialement une chaufferie conventionnelle au gaz comportant trois chaudières ; qu'à cette chaufferie conventionnelle a été ajoutée, à compter du 1er décembre 2000, une centrale de cogénération comportant deux unités de cogénération installées dans un bâtiment dédié et fonctionnant chacune grâce une turbine à gaz ; que la commune de Valence a délégué par convention d'affermage la gestion du service de distribution publique d'énergie calorifique à la société Omnium thermique des grands ensembles (Omnitherm) ; que les époux E...subissant une gêne quotidienne dans leurs conditions d'existence à raison du fonctionnement de cette centrale de chauffage ont saisi le tribunal administratif de Grenoble d'une demande tendant à la condamnation solidaire de la commune de Valence et de la société Omnitherm en réparation des nuisances sonores subies et d'une demande tendant à la désignation d'un expert ; que, par ordonnance du 1er avril 2011, le tribunal administratif de Grenoble a désigné M.A..., ingénieur acousticien, en qualité d'expert ; que celui-ci a déposé son rapport le 7 mai 2013 ; que M. et Mme E...relèvent appel du jugement du 14 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant, d'une part, que M. et Mme E...soutiennent que le jugement est entaché d'une contradiction de motifs dès lors qu'après avoir constaté que les nuisances sonores et vibratoires qu'ils subissent présentaient un caractère anormal et spécial, les premiers juges ont retenu que les requérants ne pouvaient ignorer qu'ils pouvaient subir des nuisances sonores en décidant d'acquérir une maison d'habitation située à proximité immédiate d'une installation de production de chaleur comportant des chaudières et des turbines et qu'ils n'établissaient pas une modification dans les conditions de fonctionnement de la chaufferie et de la centrale postérieure à l'installation des intéressés ; que, toutefois, une éventuelle contradiction entre les motifs d'un jugement n'est susceptible d'affecter que le bien-fondé de la décision juridictionnelle et non sa régularité ;
3. Considérant, d'autre part, qu'il ressort du dossier de première instance transmis par le tribunal à la cour que, par un mémoire enregistré le 23 juin 2015, la société Omnitherm invoquait, indépendamment de la méconnaissance de l'article L. 112-16 du code de la construction et de l'habitation, la règle jurisprudentielle de l'antériorité de l'ouvrage public par rapport à l'acquisition du bien ; que, par suite, les premiers juges n'ont pas soulevé d'office le moyen tiré de l'antériorité de l'ouvrage public et n'ont pas entaché d'irrégularité leur jugement ;
Sur la responsabilité :
4. Considérant, d'une part, que la mise en jeu de la responsabilité sans faute d'une collectivité publique pour dommages de travaux publics à l'égard d'un justiciable qui est tiers par rapport à un ouvrage public ou un opération de travaux publics est subordonnée à la démonstration par cet administré de l'existence d'un dommage grave et spécial et d'un lien de causalité entre cet ouvrage ou cette opération et les dommages subis ; que les personnes mises en cause doivent pour dégager leur responsabilité, établir que le dommage est imputable à la faute de la victime ou à un cas de force majeure, sans que puisse utilement être invoqué le fait du tiers ;
5. Considérant, d'autre part, que si le propriétaire d'une maison d'habitation ne peut ignorer, à la date de l'acquisition de l'immeuble, les inconvénients résultant de la proximité d'un ouvrage public préexistant et ne peut dès lors prétendre obtenir une indemnisation des préjudices subis à ce titre, il en va toutefois différemment d'un dommage résultant pour lui du non respect des prescriptions légales ou réglementaires régissant le fonctionnement de l'ouvrage public, dans le cas où il ne pouvait en avoir connaissance lors de l'acquisition de son habitation ou qu'il ne pouvait raisonnablement le prévoir, et dès lors que ce dommage présente un caractère grave et spécial ;
En ce qui concerne la cause des dommages :
6. Considérant que les époux E...font valoir que le fonctionnement de la centrale de Valence-le-Haut est à l'origine depuis 2006 d'importantes nuisances sonores et vibratoires ; qu'ils indiquent subir en permanence, à raison du fonctionnement défectueux de la centrale de chauffage, des bruits impulsionnels, et un bruit continu pendant cinq mois, du 1er novembre au 31 mars, ainsi que des vibrations de tout le premier étage de leur maison qui les contraignent à n'habiter qu'au rez-de-chaussée ;
7. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment des relevés sonores effectués du 19 au 21 janvier 2008 et le 13 avril 2008 par le cabinet Beaudet et du rapport d'expertise non sérieusement contesté quant à la période représentative des mesures acoustiques que, s'agissant de la centrale de cogénération, son fonctionnement ne respecte pas la réglementation relative aux niveaux sonores en période nocturne ; que ses émergences sont comprises entre 6 et 10 db(A) alors que le niveau de l'émergence admissible pour la période allant de 22 h à 7 h ainsi que les dimanches et jours fériés est de 3db (A) ; qu'en outre, les fréquences basses, à 80 et 100 Hz, engendrent une gêne importante et ont pour effet de mettre en vibration la toiture, les cloisons et les fenêtres du premier étage de la maison des épouxE... ; que, s'agissant de la chaufferie conventionnelle au gaz, le démarrage de chacune des trois chaudières engendre un bruit supérieur à la valeur fixée par la réglementation et dépasse les 3 dB(A) d'émergence autorisés ; que les mesures réalisées mettent en évidence la non-conformité nocturne de chaque composant de la chaufferie ; que ce fonctionnement défectueux a été confirmé par l'expertise confiée à M. A... qui précise que " les mesurages mettent en évidence la non-conformité nocturne de chacun des composants de la chaufferie " ;
8. Considérant que la société Omnitherm fait valoir que la qualification d'anormalité des préjudices subis du fait du fonctionnement de la centrale ne peut être retenue dès lors qu'à la date d'acquisition de leur maison d'habitation, les époux E...ne pouvaient ignorer les inconvénients résultant de l'existence et du fonctionnement de cette centrale ; que, cependant, les époux E...se prévalent de ce que les nuisances sonores excédent les sujétions que les riverains d'un ouvrage public doivent normalement supporter, compte tenu du non respect de l'arrêté préfectoral du 27 avril 2000 par lequel le préfet de la Drôme a autorisé l'exploitation de la centrale de chauffage sous réserve du respect, notamment, de valeurs limites d'émissions sonores tels que fixées par l'arrêté ministériel du 23 janvier 1997 relatif à la limitation des bruits émis dans l'environnement par les installations classées pour la protection de l'environnement, ce dont ils n'avaient pas connaissance et qu'ils ne pouvaient prévoir lors de l'acquisition de leur habitation ;
9. Considérant que les époux E...ont acquis leur habitation par un compromis en date du 22 juin 2005, l'acte notarié ayant été signé le 27 septembre suivant ; qu'ils soutiennent sans être sérieusement contredits que ce n'est qu'après leur emménagement et lors de la saison de chauffe qu'ils ont pu se rendre compte des nuisances excessives qu'ils subissent notamment en période nocturne ; qu'il résulte de l'instruction que les résultats des mesures annuelles du niveau de bruit et de l'émergence effectués par l'exploitant de l'installation classée et transmis à l'administration ne faisaient pas apparaître de dépassement des normes de bruit ; que, toutefois, selon l'expert, ces mesures, telles qu'elles ont été réalisées par les techniciens, n'auraient pas été entièrement fiables ; que si, pour les années 2006 et 2007, les requérants n'apportent pas d'élément démontrant que la centrale de chauffage ne respectait pas les prescriptions réglementaires afférentes aux valeurs limites d'émissions sonores, ils produisent des relevés sonores effectués du 19 au 21 janvier 2008 et le 14 avril 2008 par le cabinet Beaudet, dans le cadre de leur protection juridique, qui, ainsi qu'il a été dit au point précédent, établissent la non conformité du fonctionnement de la centrale de chauffage à l'arrêté du 27 avril 2000 du préfet de la Drôme prescrivant, par référence à l'arrêté ministériel du 23 janvier 1997, des valeurs limites d'émissions sonores, ce qu'a confirmé le rapport d'expertise ; que, par suite, et pour la période postérieure à 2007, la société Omnitherm ne peut se prévaloir de l'antériorité du fonctionnement de son installation, compte tenu de ce que la non-conformité des conditions de fonctionnement de l'installation aux prescriptions fixées par l'arrêté préfectoral du 27 avril 2000 ne pouvait être connue des intéressés lors de l'acquisition de leur habitation et qu'il ne résulte pas de l'instruction que le niveau sonore des installations était tel, lorsqu'ils se sont portés acquéreurs de leur maison, à une période située en dehors de la saison de chauffe, qu'ils auraient été en mesure de tenir pour vraisemblable qu'il ne respectait pas les normes applicables ;
10. Considérant que la société Omnitherm indique avoir procédé à l'arrêt définitif d'une des deux turbines à gaz de la cogénération à compter du 1er janvier 2013 et à des travaux permettant de mettre en conformité l'installation avec les prescriptions fixées par l'arrêté préfectoral du 27 avril 2000 ; qu'elle a fait réaliser une nouvelle étude de conformité acoustique de l'installation après la rénovation de la centrale de cogénération et avec une chaudière en fonctionnement minimal étant indiqué que " cependant un compresseur et deux pompes de la chaufferie ne pouvaient être arrêtés et la chaudière n°1 était en fonctionnement entre 54 et 56 % de sa puissance maximale " ; que M. et Mme E...n'établissent pas, par les relevés résultant de leurs propres observations, que les conclusions de cette étude qui précisent que les émergences nocturnes de la centrale de chauffage mesurées le 14 novembre 2014 sont inférieures aux émergences réglementaires nocturnes, seraient erronées ;
11. Considérant que la circonstance que la propriété des époux E...se situe dans une zone urbanisée ne fait pas obstacle en elle-même à la reconnaissance de la spécialité des préjudices subis ; qu'en l'espèce, eu égard à ce que la propriété des époux E...n'est située qu'à 30 mètres de la centrale de chauffage et au faible nombre de maisons dans une configuration identique, le préjudice résultant des nuisances sonores doit être regardé comme spécial ;
12. Considérant, qu'il résulte de l'instruction que, dans les circonstances rappelées ci-dessus, les nuisances sonores subies de 2008 à 2012 et résultant du non respect de la réglementation applicable à l'installation présentent par leur nature, leur intensité et leur répétition un caractère grave et spécial excédant les sujétions que les riverains de l'ouvrage public constitué par une centrale de chauffage doivent normalement supporter ;
En ce qui concerne la détermination de la personne responsable :
13. Considérant, d'une part, qu'en cas de délégation limitée à la seule exploitation de l'ouvrage, comme c'est le cas en matière d'affermage, si la responsabilité des dommages imputables à son fonctionnement relève du délégataire, sauf stipulations contractuelles contraires, celle résultant de dommages imputables à son existence, à sa nature et à son dimensionnement, appartient à la personne publique délégante ; que ce n'est qu'en cas de concession d'un ouvrage public, c'est-à-dire d'une délégation de son construction et de son fonctionnement, que peut être recherchée par des tiers la seule responsabilité du concessionnaire, sauf insolvabilité de ce dernier, en cas de dommages imputables à l'existence ou au fonctionnement de cet ouvrage ;
14. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la ville de Valence a confié, par contrat d'affermage, la gestion de son service de distribution publique d'énergie calorifique à la société Interchauffage aux droits de laquelle la société Omnitherm s'est substituée le 9 juillet 1968 et jusqu'au 1er janvier 2017 ; qu'en 1999, la société Omnitherm a construit, sous maîtrise d'ouvrage privée, la centrale de cogénération qui a donné lieu à un avenant n° 16 au contrat de délégation du service public de chauffage urbain ; qu'ainsi que l'ont relevé à bon droit les premiers juges, la société Omnitherm ne peut utilement invoquer les articles 4, 20 et 24 de l'avenant n° 10 au cahier des charges qui ont trait à la responsabilité de la commune de Valence résultant de l'existence des ouvrages dont elle est propriétaire et mettant à sa charge les modifications éventuelles de ces ouvrages en cas de modification de la réglementation dès lors que les nuisances sonores et vibratoires, qui ne sont pas imputables à l'existence, à la nature ou au dimensionnement de la centrale de chauffage, trouvent leur origine dans le fonctionnement de l'ouvrage public ; que, par suite, seule la responsabilité de la société Omnitherm peut être engagée ; que les époux E...ne sont dès lors pas fondés à demander la condamnation solidaire de la commune de Valence, personne publique délégante, dont la responsabilité n'est pas susceptible d'être engagée hormis, ce qui n'est pas établi, le cas de l'insolvabilité de la société Omnitherm ; qu'en conséquence, les épouxE..., tiers par rapport à l'ouvrage public, ne peuvent rechercher que la seule responsabilité sans faute du délégataire, la société Omnitherm ;
Sur les préjudices :
15. Considérant que les nuisances sonores et vibratoires causées par le fonctionnement de la centrale de chauffage ont été, entre 2008 et 2012, à l'origine de troubles dans les conditions d'existence des épouxE... ; qu'il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en l'évaluant à la somme de 10 000 euros ;
16. Considérant que les requérants soutiennent également qu'en raison de ces nuisances, leur maison d'habitation a perdu de sa valeur ; qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la société Omnitherm a procédé à l'arrêt définitif d'une des deux turbines à gaz de la cogénération à compter du 1er janvier 2013 et à des travaux permettant de mettre en conformité l'installation avec l'arrêté préfectoral du 27 avril 2000 susmentionné ; que cette mise en conformité est établie par une étude acoustique réalisée en novembre 2014 ; que, par suite, les requérants ne peuvent se prévaloir de la perte de la valeur vénale de leur maison d'habitation ;
17. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les requérants sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes ;
Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :
18. Considérant que les époux E...ont droit aux intérêts des sommes qui leur sont dues à compter du 24 décembre 2010, date d'enregistrement de leur demande indemnitaire au greffe du tribunal administratif de Grenoble ; que, le 17 septembre 2014, date d'enregistrement de la première demande de capitalisation des intérêts présentée devant le tribunal administratif de Grenoble, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément à l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande, ainsi qu'à chaque échéance annuelle ultérieure ;
Sur l'appel en garantie formé par la société Omnitherm à l'encontre de la ville de Valence :
19. Considérant que la société Omnitherm se borne à former un appel en garantie contre la ville de Valence sans déterminer les fondements de sa demande ni caractériser une quelconque faute ; que, par suite, son appel en garantie ne peut être accueilli ;
Sur les frais d'expertise :
20. Considérant qu'aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat./. Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties./. L'Etat peut être condamné aux dépens. " ;
21. Considérant qu'il y a lieu de mettre les frais et honoraires de l'expertise, taxés et liquidés à la somme de 19 618,59 euros, à la charge de la société Omnitherm ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
22. Considérant que M. et Mme E...demandent qu'il soit enjoint à la société Omnitherm de réaliser, sous astreinte, les mesures prescrites par l'expert aux fins de faire cesser le dysfonctionnement de la centrale ;
23. Considérant qu'il n'appartient pas au juge administratif d'adresser des injonctions à des personnes privées ; que, par suite, ces conclusions ne sont pas recevables ;
Sur les conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
24. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la ville de Valence, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, une somme quelconque au titre des frais exposés par les époux E...et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu de mettre à la charge de la société Omnitherm une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. et MmeE... ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des époux E...une somme au titre des frais exposés par la ville de Valence ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 18 octobre 2014 est annulé.
Article 2 : La société Omnitherm est condamnée à verser à M. et Mme E...une indemnité de 10 000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 24 décembre 2010. Les intérêts échus à la date du 14 septembre 2014 seront capitalisés à cette date et à chaque échéance annuelle ultérieure pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 3 : Les frais d'expertise sont mis à la charge définitive de la société Omnitherm.
Article 4 : La société Omnitherm versera à M. et Mme E...la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête, les conclusions de la société Omnitherm à fin d'appel en garantie, et les conclusions de la ville de Valence tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. et MmeE..., à la société Omnitherm et à la ville de Valence.
Délibéré après l'audience du 21 décembre 2017, à laquelle siégeaient :
M. Pommier, président de chambre,
M. Carrier, président-assesseur,
Mme Caraës, premier conseiller.
Lu en audience publique le 15 février 2018.
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N° 15LY00602