CAA de BORDEAUX, 2ème chambre - formation à 3, 12/06/2018, 18BX00638, Inédit au recueil Lebon
- Date :
- 12-06-2018
- Taille :
- 5 pages
- Section :
- Jurisprudence
- Numéro :
- 18BX00638
- Formation :
- 2ème chambre - formation à 3
Texte original :
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Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D...C...a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 15 mai 2017 par lequel le préfet de la Haute-Vienne lui a refusé le renouvellement d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 1701314 du 14 décembre 2017, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 14 février 2018, Mme D...C..., représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Limoges du 14 décembre 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 15 mai 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Vienne de lui délivrer un titre de séjour, à défaut de réexaminer sa situation, dans le délai d'un mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé ce délai ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour :
- le préfet a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français et de la décision fixant à trente jours le délai de départ volontaire :
- elles sont privées de base légale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;
- le préfet s'étant estimé tenu d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français, il a commis une erreur de droit ;
- le préfet a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 mars 2018, le préfet de la Haute-Vienne conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme C...ne sont pas fondés.
Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 8 février 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. B...a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. MmeC..., ressortissante arménienne, née en 1973, déclare être entrée en France le 18 mars 2014 sous couvert d'un visa délivré par les autorités italiennes. Elle a sollicité le 25 novembre 2016 le renouvellement d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté du 15 mai 2017, le préfet de la Haute-Vienne a refusé de renouveler le titre de séjour de l'intéressée, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'issue de ce délai. Mme C...relève appel du jugement du 14 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version en vigueur à la date de la demande présentée par MmeC... : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...)11° À l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. ".
3. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle. La partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.
4. Le refus de séjour en litige a été pris au vu d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé émis le 12 janvier 2017, indiquant que l'état de santé de Mme C...nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'il existe toutefois un traitement approprié dans son pays d'origine. Mme C...souffre d'une néoplasie mammaire et d'une pathologie thyroïdienne. Il ressort des pièces du dossier, notamment d'un certificat d'un médecin du service d'oncologie et de radiothérapie du centre hospitalier universitaire de Limoges, que son état de santé nécessite la poursuite de son traitement par le médicament Tamoxifene jusqu'en novembre 2020 et un contrôle annuel par imagerie mammaire pendant une durée de dix ans. Toutefois, si elle se prévaut d'une attestation d'un praticien hospitalier arménien, spécialisé en chirurgie thoracique et non en oncologie ainsi que d'un courriel et d'un courrier de deux laboratoires affirmant ne pas commercialiser ledit médicament en Arménie, ces pièces ne sont pas de nature, compte tenu des termes dans lesquels ils sont rédigés, à remettre en cause l'avis susmentionné du médecin de l'agence régionale de santé et à démontrer que l'intéressée ne pourrait se voir prescrire de médicaments appartenant aux mêmes classes thérapeutiques que ceux qui lui sont prescrits en France. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
5. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 1 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de
1 'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Pour l'application de ces stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.
6. Si l'appelante fait valoir sa vie commune avec un ressortissant iranien en situation régulière et l'insertion de son couple dans la société française, elle n'établit, par les pièces qu'elle produit, le début de leur communauté de vie qu'à partir du 1er août 2015. En outre, le couple est sans charge de famille en France et l'appelante n'établit ni même n'allègue être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de quarante ans. Si Mme C...se prévaut, d'une part, d'une attestation de son médecin généraliste, au demeurant postérieure à l'arrêté contesté, qui déclare que la présence de son compagnon à ses côtés " est indispensable à sa bonne santé " et de son statut de travailleur handicapé, d'autre part, de l'emploi d'agent de service qu'elle a occupé au cours des périodes allant
du 21 novembre 2016 au 6 mai 2017 puis du 16 mai au 31 mai 2017 et d'une promesse d'embauche à durée indéterminée, ces circonstances ne peuvent suffire à établir, eu égard à la durée et aux conditions de son séjour en France, que le préfet aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision de refus de séjour a été prise. Mme C...n'est dès lors pas fondée à soutenir que le préfet aurait méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, la décision litigieuse n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de MmeC....
Sur la légalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant à trente jours le délai de départ volontaire :
7. Faute pour l'appelante d'établir l'illégalité de la décision portant refus de séjour, elle n'est pas fondée à soutenir que la mesure d'éloignement et la décision fixant à trente jours le délai de départ volontaire seraient dépourvues de base légale.
8. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un État membre de l'Union européenne, d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivant : (...) / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) ".
9. L'appelante s'étant vu refuser le renouvellement de son titre de séjour, elle entrait dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut obliger un étranger à quitter le territoire français. Par suite, le préfet dont il ne ressort pas des termes mêmes de la décision attaquée qu'il se serait estimé lié par le refus de séjour, a pu, sans commettre d'erreur de droit, prendre la mesure d'éloignement en litige.
10. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6, la mesure d'éloignement et la décision fixant à trente jours le délai de départ volontaire ne sont entachées ni d'une méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni d'une erreur manifeste d'appréciation quant à leur conséquences sur la situation personnelle de MmeC....
11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera transmise pour information au préfet de la Haute-Vienne.
Délibéré après l'audience du 15 mai 2018 à laquelle siégeaient :
M. Éric Rey-Bèthbéder, président,
M. Didier Salvi, président-assesseur,
M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 12 juin 2018.
Le rapporteur,
Didier B...
Le président,
Éric Rey-BèthbéderLe greffier,
Vanessa Beuzelin
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
2
N° 18BX00638
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D...C...a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 15 mai 2017 par lequel le préfet de la Haute-Vienne lui a refusé le renouvellement d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 1701314 du 14 décembre 2017, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 14 février 2018, Mme D...C..., représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Limoges du 14 décembre 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 15 mai 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Vienne de lui délivrer un titre de séjour, à défaut de réexaminer sa situation, dans le délai d'un mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé ce délai ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour :
- le préfet a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français et de la décision fixant à trente jours le délai de départ volontaire :
- elles sont privées de base légale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;
- le préfet s'étant estimé tenu d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français, il a commis une erreur de droit ;
- le préfet a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 mars 2018, le préfet de la Haute-Vienne conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme C...ne sont pas fondés.
Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 8 février 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. B...a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. MmeC..., ressortissante arménienne, née en 1973, déclare être entrée en France le 18 mars 2014 sous couvert d'un visa délivré par les autorités italiennes. Elle a sollicité le 25 novembre 2016 le renouvellement d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté du 15 mai 2017, le préfet de la Haute-Vienne a refusé de renouveler le titre de séjour de l'intéressée, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'issue de ce délai. Mme C...relève appel du jugement du 14 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version en vigueur à la date de la demande présentée par MmeC... : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...)11° À l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. ".
3. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle. La partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.
4. Le refus de séjour en litige a été pris au vu d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé émis le 12 janvier 2017, indiquant que l'état de santé de Mme C...nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'il existe toutefois un traitement approprié dans son pays d'origine. Mme C...souffre d'une néoplasie mammaire et d'une pathologie thyroïdienne. Il ressort des pièces du dossier, notamment d'un certificat d'un médecin du service d'oncologie et de radiothérapie du centre hospitalier universitaire de Limoges, que son état de santé nécessite la poursuite de son traitement par le médicament Tamoxifene jusqu'en novembre 2020 et un contrôle annuel par imagerie mammaire pendant une durée de dix ans. Toutefois, si elle se prévaut d'une attestation d'un praticien hospitalier arménien, spécialisé en chirurgie thoracique et non en oncologie ainsi que d'un courriel et d'un courrier de deux laboratoires affirmant ne pas commercialiser ledit médicament en Arménie, ces pièces ne sont pas de nature, compte tenu des termes dans lesquels ils sont rédigés, à remettre en cause l'avis susmentionné du médecin de l'agence régionale de santé et à démontrer que l'intéressée ne pourrait se voir prescrire de médicaments appartenant aux mêmes classes thérapeutiques que ceux qui lui sont prescrits en France. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
5. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 1 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de
1 'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Pour l'application de ces stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.
6. Si l'appelante fait valoir sa vie commune avec un ressortissant iranien en situation régulière et l'insertion de son couple dans la société française, elle n'établit, par les pièces qu'elle produit, le début de leur communauté de vie qu'à partir du 1er août 2015. En outre, le couple est sans charge de famille en France et l'appelante n'établit ni même n'allègue être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de quarante ans. Si Mme C...se prévaut, d'une part, d'une attestation de son médecin généraliste, au demeurant postérieure à l'arrêté contesté, qui déclare que la présence de son compagnon à ses côtés " est indispensable à sa bonne santé " et de son statut de travailleur handicapé, d'autre part, de l'emploi d'agent de service qu'elle a occupé au cours des périodes allant
du 21 novembre 2016 au 6 mai 2017 puis du 16 mai au 31 mai 2017 et d'une promesse d'embauche à durée indéterminée, ces circonstances ne peuvent suffire à établir, eu égard à la durée et aux conditions de son séjour en France, que le préfet aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision de refus de séjour a été prise. Mme C...n'est dès lors pas fondée à soutenir que le préfet aurait méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, la décision litigieuse n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de MmeC....
Sur la légalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant à trente jours le délai de départ volontaire :
7. Faute pour l'appelante d'établir l'illégalité de la décision portant refus de séjour, elle n'est pas fondée à soutenir que la mesure d'éloignement et la décision fixant à trente jours le délai de départ volontaire seraient dépourvues de base légale.
8. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un État membre de l'Union européenne, d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivant : (...) / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) ".
9. L'appelante s'étant vu refuser le renouvellement de son titre de séjour, elle entrait dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut obliger un étranger à quitter le territoire français. Par suite, le préfet dont il ne ressort pas des termes mêmes de la décision attaquée qu'il se serait estimé lié par le refus de séjour, a pu, sans commettre d'erreur de droit, prendre la mesure d'éloignement en litige.
10. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6, la mesure d'éloignement et la décision fixant à trente jours le délai de départ volontaire ne sont entachées ni d'une méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni d'une erreur manifeste d'appréciation quant à leur conséquences sur la situation personnelle de MmeC....
11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera transmise pour information au préfet de la Haute-Vienne.
Délibéré après l'audience du 15 mai 2018 à laquelle siégeaient :
M. Éric Rey-Bèthbéder, président,
M. Didier Salvi, président-assesseur,
M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 12 juin 2018.
Le rapporteur,
Didier B...
Le président,
Éric Rey-BèthbéderLe greffier,
Vanessa Beuzelin
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 18BX00638