CAA de NANTES, 2ème chambre, 02/02/2018, 16NT03100, Inédit au recueil Lebon

Date :
02-02-2018
Size :
4 pages
Section :
Case law
Number :
16NT03100
Formation :
2ème chambre

Original text :

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Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le préfet de la Vendée a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 28 avril 2015 par lequel le maire de la commune de Noirmoutier-en-l'Ile a délivré à la SARL Nauleau Immobilier un permis de construire un bâtiment comportant quatre locaux commerciaux sur un terrain situé 6 rue de la Prée aux Ducs, ainsi que la décision implicite de rejet, née du silence gardé par le maire sur le recours gracieux formé le 23 juin 2015 par le sous-préfet des Sables-d'Olonne.
Par un jugement n° 1508767 du 5 juillet 2016, le tribunal administratif de Nantes a annulé l'arrêté du 28 avril 2015 ainsi que la décision implicite rejetant le recours gracieux.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 8 septembre 2016 et le 25 avril 2017, la SARL Eric Nauleau Immobilier, représentée par la SELARL Redlink, demande à la cour, en l'état de ses dernières écritures :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 5 juillet 2016 ;
2°) de rejeter le déféré formé par le préfet de la Vendée devant le tribunal administratif de Nantes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 7 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
­ le déféré formé par le préfet devant le tribunal administratif était irrecevable faute à l'autorité préfectorale de lui avoir régulièrement notifié le recours gracieux dans les conditions prévues à l'article R.600-1 du code de l'urbanisme dès lors que le courrier qui lui a été adressé ne contenait pas la copie annoncée du recours gracieux formé devant le maire de Noirmoutier-en-l'Ile et que l'administration ne lui a pas transmis cette pièce malgré une demande en ce sens ;
­ le jugement attaqué est irrégulier dès lors que le principe du contradictoire n'a pas été respecté, le dernier mémoire du préfet lui a été notifié la veille de l'audience ;
­ les premiers juges se sont mépris sur la portée du permis de construire en considérant qu'il autorisait la construction d'un logement alors qu'il portait uniquement sur des locaux commerciaux ;
­ le permis de construire n'a pas été pris en méconnaissance des dispositions de l'article R.111-2 du code de l'urbanisme dès lors que l'existence du risque nécessitant des prescriptions plus contraignantes ne peut se fonder sur des pièces postérieures à la délivrance du permis, ni sur un plan de prévention des risques naturels prévisibles approuvé le 30 octobre 2015 et qu'en l'absence de pièces à usage d'habitation, il n'avait pas à contenir de prescriptions relatives à la côte minimale de premier plancher habitable ;
­ le risque de défaillance du casier hydraulique de la digue Jacobsen tel que pris en compte dans le plan de prévention des risques naturels prévisibles littoraux et, par suite, du risque de submersion marine du terrain d'assiette du projet, n'est pas avéré.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 novembre 2016, le préfet de la Vendée conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par la SARL Eric Nauleau Immobilier n'est fondé.
Par un mémoire, enregistré le 6 mars 2017, la commune de Noirmoutier-en-l'Ile, représentée par son maire en exercice, par la SELARL MRV Avocats, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 5 juillet 2016 ;
2°) de rejeter le déféré formé par le préfet de la Vendée devant le tribunal administratif de Nantes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
­ le permis de construire que le maire a délivré à la SARL Eric Nauleau Immobilier n'a pas été pris en méconnaissance des dispositions de l'article R.111-2 du code de l'urbanisme en l'absence de risque avéré et de l'existence de prescriptions dont le préfet n'établit pas, compte tenu de la destination de la construction et de la nature des travaux autorisés, qu'elles seraient insuffisantes pour assurer la sécurité publique alors que l'autorité préfectorale ne peut se fonder sur des études finalisées après la délivrance du permis litigieux, ni sur un avant-projet de zonage ;
­ en tout état de cause, le plan de prévention, dans sa version définitivement approuvée, autorise le type d'occupation des sols faisant l'objet du permis de construire litigieux ;
­ contrairement à ce que soutient le Préfet, le risque de submersion auquel est exposé le terrain d'assiette du projet, au regard de sa localisation, ne résulte nullement d'une éventuelle rupture de la digue de Jacobsen ainsi qu'il ressort de l'étude menée par le bureau d'études DHI.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...'hirondel,
- les conclusions de M. Derlange, rapporteur public,
- et les observations de MeC..., substituant MeE..., représentant la SARL Eric Naulleau Immobilier, et de MeD..., substituant MeB..., représentant la commune de Noirmoutier-en-l'Ile.
1. Considérant que la SARL Eric Nauleau Immobilier relève appel du jugement du 5 juillet 2016 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande du préfet de la Vendée, le permis de construire que le maire de Noirmoutier-en-l'Ile lui a délivré le 28 avril 2015 en vue de l'édification d'un bâtiment comportant quatre locaux commerciaux sur un terrain situé 6 rue de la Prée aux Ducs ;
Sur la recevabilité du déféré préfectoral :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme : " En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l'encontre (...) d'un permis de construire (...), le préfet ou l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation (...) L'auteur d'un recours administratif est également tenu de le notifier à peine d'irrecevabilité du recours contentieux qu'il pourrait intenter ultérieurement en cas de rejet du recours administratif. / La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du (...) recours. (...) " ; que ces dispositions font obligation à l'auteur d'un recours contentieux de notifier une copie du texte intégral de son recours à l'auteur ainsi qu'au bénéficiaire du permis attaqué ; que l'auteur d'un recours administratif formé à l'encontre d'un tel permis de construire est tenu de le notifier dans les mêmes conditions que s'il s'agissait de l'exercice d'un recours contentieux ; que lorsque le destinataire de cette notification soutient que la notification qui lui a été adressée ne comportait pas la copie de ce recours, il lui incombe d'établir cette allégation en faisant état des diligences qu'il aurait vainement accomplies auprès de l'expéditeur pour obtenir cette copie ou par tout autre moyen ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que pour satisfaire à l'obligation de notification de son recours gracieux contre le permis délivré par le maire de Noirmoutier-en-l'Ile à la SARL Eric Nauleau Immobilier, le préfet de la Vendée a adressé à la société titulaire de ce permis, le 24 juin 2015, soit dans le délai de quinze jours imparti par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme, un courrier indiquant que, dans le cadre du contrôle de légalité, il avait saisi le maire de Noirmoutier-en-l'Ile d'un recours administratif concernant un permis qui lui a été délivré pour la construction d'une maison d'habitation, sise 6 rue de la Prée au Duc, et précisant qu'une copie de sa lettre valant recours gracieux était jointe à ce pli ; que la SARL Eric Nauleau Immobilier soutient que ce pli ne contenait pas la pièce annoncée ;
4. Considérant qu'à l'appui de son allégation, la SARL Eric Nauleau Immobilier produit la copie du courrier du 8 juillet 2015, reçu le 10 juillet suivant, par lequel elle a informé le préfet de ce qu'il avait omis de joindre à son courrier la copie du recours administratif qu'il avait adressé au maire de Noirmoutier-en-l'Ile et en lui demandant, en conséquence, de lui transmettre ce document ; que la société requérante établit ainsi avoir effectué les diligences nécessaires pour obtenir une copie de la pièce manquante ; qu'il est constant que le préfet n'a pas répondu à ce courrier ; que, pour s'affranchir de son obligation de transmettre cette pièce, le préfet ne saurait utilement faire valoir que la demande de la SARL Eric Nauleau Immobilier serait tardive pour avoir été présentée deux jours seulement avant l'expiration du délai de quinze jours prévu à l'article R.600-1 du code de l'urbanisme, ni que l'organisation qui avait été mise en place au sein de ses services à la veille d'un week-end prolongé ne lui permettait pas de répondre à la demande à l'intérieur de ce même délai ; que, dans ces conditions, le préfet de la Vendée n'établit pas avoir régulièrement notifié, conformément aux dispositions de l'article R.600-1 du code de l'urbanisme, la copie de son recours gracieux au bénéficiaire du permis de construire ; que le recours qu'il a exercé auprès du maire de Noirmoutier-en-l'Ile n'a pu, dans ces conditions, proroger le délai de recours contentieux ; que, par suite, le déféré du préfet de la Vendée, enregistré au greffe du tribunal administratif de Nantes, le 21 octobre 2015, après l'expiration du délai de recours contentieux, était irrecevable ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que la SARL Eric Nauleau Immobilier est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé le permis de construire du 28 avril 2015 et la décision implicite de rejet du recours gracieux dirigé contre ce dernier ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant qu'en application de ces dispositions, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la SARL Eric Nauleau Immobilier et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces mêmes dispositions et de mettre à la charge de l'Etat la somme que la commune de Noirmoutier-en-l'Ile demande au même titre ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n°1400499 du 5 juillet 2016 du tribunal administratif de Nantes est annulé.
Article 2 : Le déféré du préfet de la Vendée présenté devant le tribunal administratif de Nantes est rejeté.
Article 3 : L'Etat versera à la SARL Eric Nauleau Immobilier la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions présentées par la commune de Noirmoutier-en-l'Ile au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Eric Nauleau Immobilier, au ministre de la cohésion des territoires et à la commune de Noirmoutier-en-l'Ile.
Copie en sera adressée pour son information au préfet de la Vendée.
Délibéré après l'audience du 16 janvier 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Pérez, président,
- Mme Gélard, premier conseiller,
- M. A...'hirondel, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 2 février 2018.
Le rapporteur,
M. F...Le président,
A. PEREZ
Le greffier,
K. BOURON
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°16NT03100