CAA de DOUAI, 3ème chambre - formation à 3, 05/10/2017, 17DA01080, Inédit au recueil Lebon

Date :
05-10-2017
Size :
5 pages
Section :
Case law
Number :
17DA01080
Formation :
3ème chambre - formation à 3

Original text :

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Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 8 juillet 2016 du préfet de l'Eure refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination de l'éloignement.
Par un jugement n° 1700290 du 6 avril 2017, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 2 juin 2017, M. A...B..., représenté par Me C... D..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 6 avril 2017 du tribunal administratif de Rouen ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 8 juillet 2016 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Eure de lui délivrer une carte de séjour temporaire, valable un an, et portant la mention " vie privée et familiale " ou une autorisation provisoire de séjour, dans un délai d'un mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Paul-Louis Albertini, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M.B..., ressortissant sénégalais né le 19 mai 1974, déclare être entré en France en avril 2012 ; qu'il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié " ; que, par un arrêté du 8 juillet 2016, le préfet de l'Eure a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le Sénégal comme pays de destination d'éloignement ; que, M. B...relève appel du jugement du 6 avril 2017 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 juillet 2016 ;
Sur le moyen commun aux décisions en litige :
2. Considérant que les décisions en litige comportent l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et qui permettent à M. B...de les discuter et au juge de les contrôler ; qu'elles sont donc suffisamment motivées au regard des exigences de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté ;
Sur la décision de refus de titre de séjour :
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit de l'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une autorisation provisoire de séjour peut être délivrée à l'un des parents étranger de l'étranger mineur qui remplit les conditions mentionnées au 11° de l'article L. 313-11, sous réserve qu'il justifie résider habituellement en France avec lui et subvenir à son entretien et à son éducation, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) " ;
4. Considérant, d'une part, que si M. B...soutient que les dispositions de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit de l'asile ont été méconnues par le préfet de l'Eure, il n'a pas expressément fondé sa demande de titre de séjour sur ces dispositions ; qu'ainsi, le préfet n'était pas tenu d'examiner la demande de titre de séjour de M. B... sur un fondement différent de celui dont il était clairement saisi en dernier lieu ; qu'au demeurant, il ressort des pièces du dossier que cette autorisation a déjà été délivrée à son épouse, MmeB... ; que la décision attaquée n'a, ainsi, pas méconnu les dispositions de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit de l'asile ;
5. Considérant, d'autre part, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et des motifs des décisions attaquées que le préfet de l'Eure n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle et familiale de M.B... ; qu'ainsi, le moyen tiré du défaut d'examen ne peut qu'être écarté ;
6. Considérant qu'aux termes du paragraphe 42 de l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006 modifié par l'avenant du 25 février 2008, entré en vigueur le 1er août 2009 : " Un ressortissant sénégalais en situation irrégulière en France peut bénéficier, en application de la législation française, d'une admission exceptionnelle au séjour se traduisant par la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant : soit la mention " salarié " s'il exerce l'un des métiers mentionnés dans la liste figurant en annexe IV de l'Accord et dispose d'une proposition de contrat de travail. / soit la mention " vie privée et familiale " s'il justifie de motifs humanitaires ou exceptionnels " ; qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ;
7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...a sollicité son admission au séjour en se prévalant d'une promesse d'embauche du 26 mai 2015 de la SARL Style Bat pour un emploi à durée indéterminée de peintre pistoleur ; que ce métier entre dans le champ d'application de la liste figurant à l'annexe IV de l'accord franco-sénégalais auquel renvoie l'article 42 de ce même accord ; que, toutefois, ces stipulations se réfèrent à la législation française sur l'admission exceptionnelle au séjour et donc aux dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il appartient dès lors à l'intéressé, d'établir l'existence d'un motif exceptionnel d'admission au séjour au sens de ces dispositions ;
8. Considérant que M. B...fait valoir qu'il est marié depuis près de douze ans avec MmeB..., son épouse, titulaire d'une autorisation de séjour prévue par les dispositions de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que sa présence est indispensable au développement de son enfant atteint de troubles autistiques ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que M. B...vit séparé de son épouse et de leur enfant ; que le requérant a, d'ailleurs, reconnu celui-ci que tardivement ; qu'il dispose d'attaches familiales importantes dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 34 ans ; qu'il est entré en France depuis moins de quatre ans à la date de la décision attaquée ; que, dans ces conditions, M. B...ne peut être regardé comme justifiant d'une circonstance humanitaire ou d'un motif exceptionnel au sens des dispositions de l'article L. 313-14 précité pour obtenir son admission au séjour sur le fondement de ces dispositions ; qu'il n'est, dès lors, pas fondé à soutenir qu'en rejetant sa demande de titre de séjour, le préfet de l'Eure a méconnu les stipulations du paragraphe 42 de l'accord susvisé du 23 septembre 2006 et les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
9. Considérant qu'aux termes du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : /(...)/ 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
10. Considérant que M. B...ne justifie pas de l'absence d'attaches familiales dans son pays d'origine ainsi que de l'intensité de ses liens familiaux en France ; qu'il vit séparément et n'établit pas contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de son enfant ; que dans ces conditions, eu égard à la durée et aux conditions du séjour de M.B..., la décision de refus de titre de séjour du préfet de l'Eure n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et n'a ainsi méconnu ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, tant au regard de la vie privée que de la vie familiale du requérant ; qu'elle n'est pas davantage entaché d'une erreur de fait ni d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;
11. Considérant qu'aux termes des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. " ;
12. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...n'a reconnu son fils qu'au bout de trois années, qu'il vit séparément de celui-ci et qu'il n'établit pas participer effectivement à l'entretien et à l'éducation de son fils ; que, dans ces circonstances, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant doit être écarté ;
Sur la décision faisant obligation de quitter le territoire français :
13. Considérant qu'eu égard à ce qui a été dit aux points 2 à 12, le moyen tiré de ce que la décision faisant obligation à M. B...de quitter le territoire français devrait être annulée en conséquence de l'annulation de la décision de refus de séjour sur le fondement duquel elle a été prise doit être écarté ;
14. Considérant qu'indépendamment de l'énumération faite par l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'un arrêté de reconduite à la frontière, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une mesure d'éloignement à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour ; que, lorsque la loi prévoit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure d'éloignement ;
15. Considérant que M. B...n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait dû se voir délivrer un titre de séjour de plein droit en application des dispositions de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors, il n'est pas fondé à soutenir que le préfet ne pouvait, pour ce motif, édicter la mesure d'éloignement contestée ;
16. Considérant que pour les mêmes motifs que ceux énoncés précédemment la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, et n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de celle-ci sur sa situation personnelle ;
Sur la décision fixant le pays de destination :
17. Considérant que l'obligation de quitter le territoire n'étant pas entachée d'illégalité, la décision fixant le pays de destination de l'éloignement de M. B...n'est pas dépourvue de base légale ;
18. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ; que ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B..., au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et à Me C...D....
Copie en sera adressée pour information au préfet de l'Eure.
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N°17DA01080